Biographie

Chloé SCHMITT

Oeuvre(s)

" Les affreux "

Roman

Albin Michel

Chloé Schmitt, 21 ans, est étudiante à Sciences-Po Paris.
« D’un jour à l’autre, un homme perd l’usage de son corps. Pas tout à fait mort, plus
réellement vivant, il assiste, impuissant, au spectacle d’un monde sur lequel il n’a plus prise. Lâche, cruel, vulgaire. Le monde tel qu’il est ou tel qu’il le voit ? Dans un souffle furieux, porté par une langue heurtée et sans cesse réinventée, ce roman raconte la déchéance d’un homme et, au-delà, l’impossible communication dans une société qui court à sa perte. » (présentation de l’éditeur)
« Cette histoire sordide, d'où l'humour est absent, est menée tambour battant. Chloé Schmitt, qui a aussi lu Jean-Pierre Martinet, n'a pas lésiné sur la noirceur. Au final, elle réussit l'examen de passage haut la main. »(Le Figaro, 6 septembre 2012)
C'est venu d'un coup, derrière l’oeil gauche. J'ai craché le dentifrice. Une main appuyée au lavabo, l'autre contre la tempe, j'ai appelé Clarisse. Elle sortait des toilettes en pyjama.
- Oui ?
Elle s'est savonné les mains, trituré le reflet. Le sang me cognait l’oeil par à-coups. Tâtonné, trouvé le mur, jusqu'à la cuisine, une chaise. Le carrelage gondolait. Elle m'a dévisagé. Du dentifrice dégoulinait encore de mes lèvres.
- Ce n'est pas ton jour on dirait. Ça va ?
Affirmatif. Réflexe à la con... Le temps d'enfiler un jean, une veste, elle était à la boulangerie. Papotages, quinze minutes, il n'en a pas fallu plus. La douleur m'élançait tout le crâne maintenant. Elle s'agrandissait encore, gagnait la chaise, la table, tout. Le flou écumait la cuisine, la douleur à sa suite. J'avais plus commencement ni fin. C'était moi le putain de monde !... Moi !... J'ai respiré grande gorge, une fois, deux fois, ça s'est calmé un peu. Je sais plus trop comment je suis arrivé au robinet, sortir du sale rêve à coups d'eau froide. Le jet a juste réveillé le mal. Je titubais. M'appuyer... J'ai cherché le mur, même pas trouvé mon bras... Un bras... Plus mien... Il balançait raide, le corps derrière. Puis... Rien. Je voyais plus rien. Ça déferlait... Que de la confusion... Impossible à démêler... Et je me suis écroulé.
Ma nouvelle vie débutait. Vie, c'est pas le mot... Non, pas le mot.