Biographie

Corinne D'ALMEIDA

Oeuvre(s)

" Antibes "

Roman

Editions Gallimard

D’origine togolaise, Corinne d’Almeida vit à Paris depuis l’âge de 19 ans.

« Voici un livre qui par la richesse de sa composition autant que par la complexité de son écriture témoigne d’une maîtrise peu ordinaire. Au centre, la narratrice, aide-soignante d’une vieille dame dans un immeuble parisien. D’origine africaine, elle se rappelle un passé lourd d’événements tragiques. Le souvenir de scènes sexuelles auxquelles l’initie sa sœur aînée la fascine au point qu’elle en ressuscite la magie quelque peu perverse. Le débordement de la rêverie s’accompagne d’un lyrisme tout à la fois torride et funèbre. Elle retire de ce vertige des visions inoubliables. » (Présentation de l’éditeur)

Il sentait sa propre vie sortir de lui, il sentait la vie de son frère sortir du corps de son frère comme si en même temps qu’il était lui-même, il était aussi son frère, tous deux merveilleusement vides, non vivants mais non morts, tenant leurs vies en laisse. Fumerolles légères de même nature et pleines de courbes, leurs vies emplissaient la voiture, elles en débordaient – débordement qui le ravissait car il signifiait que lui oui lui recelait tant de vie qu’elle pouvait excéder les limites de son corps, excéder les limites d’une voiture, excéder les limites de son monde limité, les bornes du monde qu’il pouvait voir et ressentir pour fluer paisiblement et comme normalement vers partout, vers ce qu’il ne connaissait pas, vers ce qu’il ne soupçonnait pas et qui n’existait pas–, elles se répandaient sur la route, elles envahissaient la campagne, entraient dans les granges et les maisons où on les prenait pour de la vulgaire brume, elles s’infiltraient dans la terre, elles y disparaissaient et il ralentissait, il se garait devant l’institution, ils étaient arrivés. Ils traversaient le jardin l’un derrière l’autre. Le jour, ce jardin était une splendeur de buis taillés. La nuit, c’était un cauchemar surpeuplé. Il sonnait. Il remettait son frère. Il s’en retournait.

« Le corps féminin a son langage, celui de la blessure et du désir, de la décrépitude et de la maternité. Le jeune écrivain de 37 ans Corinne d’Almeida perçoit ce silencieux murmure de la vie qui, à chaque instant, repousse les signes d’une mort tenace. Dans son premier roman, elle réussit, par l’écriture, à transmettre cette condition universelle de la chair vivante.» (Orianne Jeancourt, Transfuge, février 2010)