Biographie

Martin MATALON

Martin Matalon étudie à la Juilliard School de New York où il obtient son Master de composition. En 1989, il fonde Music Mobile, ensemble new-yorkais consacré au répertoire contemporain dont il sera directeur jusqu’en 1996. Il reçoit de nombreux prix, entre autres, de la J.S Guggenheim fondation de New York, le Charles Ives Scholarship de l’American Academy and Institute of Arts and Letters, le Grand prix des Lycéens…

En 1993, L’IRCAM lui commande une nouvelle partition pour la version restaurée du film de Fritz Lang, Metropolis. Puis il se plonge dans l’univers de Luis Buñuel en composant pour Un Chien andalou (1927), L’Age d’or (1931) et Las Hurdes (terre sans pain) (1932). Son catalogue comprend un nombre important d’œuvres de musique de chambre et orchestre et couvre un large spectre de genres différents : théâtre musical, musique mixte, contes musicaux, ciné-concerts, musique vocale, installations, œuvres chorégraphiques, opéra…

Parallèlement il mène une activité de chef d’orchestre. Il dirige notamment l’Ensemble Modern, MusikFabrik, Barcelona 216, l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo, l’orchestre d’Auvergne, Court-circuit, l’Ensemble Intercontemporain, l’Orchestre National de Montpellier,…

Martin Matalon enseigne également la composition au CRR d’Aubervilliers. Il est professeur invité à McGill University, UC Berkeley, l’Ircam, au Centre Acanthes, dans des nombreuses académies d’été : CompoLab, Injuve, Institut Français - Barcelona New Modern Project… Il est compositeur en résidence à l’Arsenal de Metz et auprès de l’Orchestre National de Lorraine (2003-2004), à La Muse en Circuit (2005-2010), au Festival les Arcs (2014)… Depuis 2017 il est professeur au CNSM de Lyon.

Son Opéra l’Ombre de Venceslao sur un livret et mise en scène de Jorge Lavelli d’après la pièce de Copi, est créé à l’Opéra de Rennes en octobre 2016 et fait l’objet d’une tournée en France et Amérique du Sud dans 11 maisons d’Opéra avant d’être nominé aux Victoires de la musique 2017.

Oeuvre(s)

" Rugged "

Pour orchestre avec cor obligato

SÉLECTION 2019

La ligne et l’espace ont été deux problématiques importantes de cette pièce. Ces deux paramètres évolueront et seront réinterprétés tout le long des 5 mouvements enchaînés qui forment cette œuvre.

La disposition de l’orchestre divisé en deux groupes est séparée par un troisième composé essentiellement par la section des cors, qui est disposé au centre de la scène et au centre des deux groupes orchestraux. Les cors auront, à certains moments de l’œuvre, un rôle protagoniste.

Le traitement spatial sera aussi articulé par le travail sur les propriétés acoustiques (tessiture et registre) intrinsèques aux instruments individuels de l’orchestre. La dialectique de l’espace créée entre la ligne orchestrale atomisée et l’emploi de l’orchestre de façon compacte, massive, sera au cœur de la fabrication formelle de l’œuvre. Rugged ouvre avec une ligne (si on peut la nommer ainsi) atomisée et fragile qui se déploie sur tout le registre orchestral et dont le seul élément de liaison est une articulation temporale régulière et pulsée. Cette ligne va subir des avatars et des transformations diverses de densification et cristallisation pour aboutir dans une section dynamique de tutti orchestral qui se transformera subitement à la fin dans une réinterprétation de la ligne d’ouverture mais encore plus fragile plus éparse, plus raréfiée que la précédente, cette ligne sera déployée sur un plan sonore suspendu…

Chaque nouvelle section, dans Rugged, chasse la précédente sans jamais revenir en arrière… Trois types d’articulations temporelles ont été au cœur de mes préoccupations : le flux sonore : une sorte de masse mouvementée souvent chaotique, irrégulière et constante ; la pulsation atomisée : une articulation régulière mais dont le timbre, le registre et l’instrumentation changent à chaque instant et puis un temps suspendu où l’évolution du timbre et la qualité du grain sonore sont les composantes principales…

Martin Matalon

" Trame X "

Pour accordéon solo et flûte, clarinette, basson, cor, trompette, 2 percussions, harpe, violon et violoncelle

Gérard Billaudot

SÉLECTION 2013

Les mesures 76 à 83 (inclues) ont été coupées de la partition jointe à la présente.


C R E A T I O N
12 janvier 2012 - Ensemble 2e2m – CRR de Paris - Max Bonney, accordéon - dir. Pierre Rouiller.


N O T I C E
Trame X pour accordéon solo et ensemble, poursuit un cycle d’œuvres concertantes commencé en 1997. Mon intérêt pour ce genre réside dans la tension entre une écriture qui valorise tous les instruments, en établissant des liens complexes entre eux et une écriture soliste. Le nom générique de "Trame" est inspiré du poème éponyme de Jorge Luis Borges, qui nous dévoile la synchronie existant entre tous les éléments qui constituent l'"histoire universelle". Moins ambitieuses et plus circonscrites, mes Trames évoquent tout simplement le tissage propre à chaque composition, son fil d'Ariane. Elles abordent les problématiques compositionelles qui me préoccupent aux différents moments de leur écriture, à la manière d'un journal intime.


La forme concertante nous oblige quelque part à traiter la problématique de la narration. La présence du soliste suscite une focalisation de l’écoute, il possède par lui-même une dimension narrative ; celle-ci m’intéresse non pas en tant que continuité ou linéarité, mais plutôt par tous les entrelacs et poches narratives qu’on peut construire entre la narration et ses digressions voire son abolition.


Un  de  mes  buts  dans  ce  cycle,  est  de  trouver  des  articulations  formelles  qui échappent aux contrastes traditionnels et qui puissent recréer des polarités d’autre genre. Ainsi dans Trame V la prémisse d’apesanteur et de densité ont été au cœur de la problématique formelle... Ici, il s’agît de rapidité et de lenteur... non pas dans le
 
sens du débit plus ou moins véloce des notes mais dans l’articulation des idées, leur échange, leur agilité, leur déploiement dans le temps...
Ainsi le premier mouvement, évolue dans un champ sonore où les évènements s’échangent de façon véloce. Le procédé compositionnel est par contre circulaire et donc  statique.  Deux  plans  distincts  forment  cette  section  :  un  arrière  plan  où s’articule une pulsation atomisé dans l’ensemble et un premier plan formé par des objets ou petites formes qui s’incrustent dans cette nappe mouvante.


Dans le deuxième mouvement, de nature plus harmonique, quatre plans distincts se superposent : le premier (qui est au 4ème plan) est constitué à lui tout seul par un très lent et long glissando du violon qui traverse le mouvement. La deuxième strate est une progression harmonique générée par le vibraphone (et ponctuellement l’accordéon) et son extension instrumentale (vents) qui transforment le son tel des traitements électroniques (modulation de fréquence, filtrages, granulations, délais spectraux...). Le troisième plan est pris en charge par l’accordéon et corroboré par d’autres instruments qui le miment et forment des objets nébuleux, indéfinis, dans les régions graves du spectre. Un quatrième plan est articulé par les pizz. du violoncelle qui ponctuent irrégulièrement et lentement ce mouvement.


La troisième section est structurée par deux plans: une sorte de pulsation fantôme (souffle et modes de jeux de résultante sonore similaire) et formes et objets, articulés principalement par l’instrument soliste et enrichis par le reste de l’ensemble.


Le quatrième mouvement, en suspension, est formé par un plan unique articulé par l’accordéon. Le reste de l’ensemble a le rôle de caisse de résonance ou d’extension du timbre du soliste.


Du point de vue temporel j’ai essayé d’employer une grande partie du spectre: de la pulsation clairement articulé (1er mouvement), à la pulsation fantôme (3 mvt) au temps suspendu sans pulsation (4ème section) à une combinaison subtile des autres temporalités ci-dessus décrites (2ème mouvement).


C’est dans le devenir et les transformations de chaque section ainsi que dans la dialectique entre les différents mouvements que la trame de l’œuvre se tisse.
Martin Matalon