Biographie

Marco STROPPA

Oeuvre(s)

" Re Orso "

Fable musicale, opéra

Ricordi

SÉLECTION 2013

C R E A T I O N
19 mai 2012 – Paris - Opéra comique.
Commande de l'Opéra Comique, La Monnaie De Munt (Bruxelles), l'Ensemble intercontemporain, l'Ircam-Centre Pompidou, Françoise et Jean-Philippe Billarant, et de l'État français.


N O T I C E
Légende  d'Arrigo  Boito  |  Musique  Marco  Stroppa  |  Livret  Catherine  Ailloud- Nicolas et Giordano  Ferrari | Mise en scène Richard Brunel  | Direction musicale Susanna   Mälkki   |  Scénographie  et  costumes  Bruno  De  Lavenère  |  Création lumières Laurent Castaingt | Collaborateur aux mouvements Thierry Thieû Niang | Réalisation informatique musicale Ircam Carlo Laurenzi | Conseiller scientifique Ircam Jean Bresson


Rodrigo Ferreira Re Orso, Monica Bacelli le ver, Marisol Montalvo Oliba, une courtisane, Alexander  Kravets  le  trouvère, un  courtisan, Cyril  Anrep,  Geoffrey Carey, Daniel Carraz, Piera Formenti, Papiol des courtisans, le frère...Ensemble intercontemporain


Légende du librettiste  le plus célèbre de Verdi, Re Orso  d'Arrigo Boito retient l'attention de
Marco Stroppa depuis plusieurs années.


Satyre politique, fable sur le pouvoir, Re Orso raconte en vers lyriques l'histoire d'un roi effroyable, Ours, qui régnait sur la Crète avant l'an 1000, et craignant plus que tout, la présence d'un ver de terre. Chaque personnage de cette cour est incarné par un instrument soliste, l'écriture s'appuyant sur les caractéristiques rythmiques de la langue italienne et sur la technologie d'OM Chant. Opéra à numéros, avec litanies, confessions et orgies, avec disklavier chanteur et solos de bravoure stylisant les rythmes  de  danse,  Re  Orso  se  souvient  de  la  rapidité  du  Falstaff  de  Verdi.  Au deuxième acte, l'opéra se transforme en musique purement électronique, où le minutieux travail de la projection sonore dans l'espace s'intègre à l'esprit bouffe.
 
ARGUMENT
Exorde
Zuzzurellone (grand enfant)
Une légende en deux parties va se raconter.  Toute ressemblance avec des personnes existant ou ayant existé ne saurait être que fortuite.


Première Partie : Ours vivant
Scène 1 : Histoires anciennes ébouriffées  (passacaille rocky avec verve)
À la cour de Crète, avant l’an mil, le Roi Ours fait régner la terreur. Il commet un meurtre en public, et contraint ses courtisans à chanter sa gloire paradoxale : ses richesses, ses forfaits, sa concupiscence.
À  la  fin  de  la  bénédiction nuptiale,  Fenella  reconnaît  le  marié  et  parvient  à  le dénoncer publiquement. Profitant de la stupéfaction générale, elle s’enfuit.


Scène 2 : Spectrum (pompeux, décomplexé)
Mais la nuit suivante, une voix mystérieuse le hante. Est-ce la voix de la femme qu’il a tuée ? A-t-elle réchappé à son meurtre ? Est-ce la voix de la conscience qui, tel un ver, ronge le Roi Ours ?


Scène 3 : Sérénade de pierre (loufoque)
Pour échapper à ces cauchemars, il veut s’unir à Oliba, une jeune femme étrangère qu’il a fait enlever. Pétrifiée, elle se refuse à lui et il tente de la violer, aidé de ses sbires.


Scène 4 : Duel dialectique (embrouillé) et larve de Tango (émietté)
La voix s’incarne. La femme ou son fantôme réapparaît, c’est le Ver. S’engage avec le Roi un duel dialectique qui se transforme en duo. Le Roi reconnaît l’ambivalence de son âme.


Scène   5  :  Noces  et  chansons   (outrecuidant)  et  intermède   historique   (festif, chaotique)
Le lendemain, on célèbre le repas de noces du Roi et d’Oliba. Un Trouvère vient chanter, accompagné de son double instrumental,   un piano robotisé.  Papiol,  le bouffon du Roi,  est invité à faire des tours.  Le Ver raconte  à Oliba  les dessous de cette  étrange  Cour.  Puis le Trouvère imprudemment chante ’amour à Oliba. Le Roi Ours déchaîne sa violence. Il tue le Trouvère, Oliba et le Ver. Il invite sa Cour horrifiée à une orgie de violence et de blasphèmes.


Deuxième Partie : Ours mort
Scène 1 : Confession (rugueux, obsolète)
Le Roi Ours, mourant, est face à son confesseur. Il lui propose de l’argent  contre l’absolution de ses crimes.  Mais cette confession tourne au cauchemar.  Les morts  de la première partie réapparaissent pour rejouer au Roi le théâtre de ses méfaits. Le Ver raconte le voyage qui l’a conduit à retrouver le Roi Ours.


Scène  2 : Litanie,  grand tutti bordélique  (grand pandémonium, comme une gigue boiteuse)
 
Tous s’unissent dans une litanie diabolique qui accompagne la mort du Roi, une mort sans rédemption.


Scène 3 : Pierre tombale, cercueil, linceul (serein, sérieux, simple, sûr)
Le Ver, devenu voix du peuple, voix du poète, célèbre sa victoire sur le tyran.
Catherine Ailloud-Nicolas


PROGRAMME DE L’OPERA COMIQUE
« (…) Commandée en 2008 à Marco Stroppa et prévue tout d’abord pour juin 2011, la
création  mondiale  de  Re  Orso  a  été  repoussée  à  mai  2012  afin  de  laisser  au compositeur le temps d’achever son oeuvre. Une telle souplesse prévalait dans le champ de la création tant que les théâtres fonctionnaient sur le mode du répertoire – Pelléas et Mélisande ayant ainsi été achevé trois mois avant sa création, et les interludes composés quelques jours avant le jour J. En 2010- 2011, la dramaturgie de Re  Orso  a  en  particulier été  totalement reformulée en  étroite  collaboration avec Richard Brunel, le metteur en scène, et les deux dramaturges, Catherine Ailloud- Nicolas  et  Giordano  Ferrari.  Le  livret  résulte  en  effet  de  l’adaptation,  pour  la musique et la scène d’aujourd’hui, d’un poème dramatique italien d’Arrigo Boito que celui-ci, fameux librettiste de Verdi et compositeur dramaturge à l’instar de Wagner, avait conçu pour la seule lecture et publié, sous plusieurs versions, entre 1864 et
1902.
Écrit en vers hétérométriques, structuré comme une oeuvre musicale, le Re Orso de Boito se présente en deux parties : Orso vivo (Ours vivant) et Orso morto (Ours mort). Oeuvre double, le Re Orso de Marco Stroppa comporte une première partie de musique surtout instrumentale, terminée en mars 2012, et une seconde partie plutôt électronique  élaborée  à  l’Ircam,  parachevée  en  avril  2012  mais  qui  est  le  fruit d’années de recherches sur plusieurs systèmes et programmes informatiques.
Grâce à l’amplification des chanteurs et des comédiens tout au long de la représentation, et à l’usage de systèmes transformant leurs voix ou produisant des voix de synthèse et des sons imaginaires, l’opéra ne présente pas de rupture entre les deux langages musicaux, mais au contraire un jeu de continuité, de conjugaison et de contrastes qui participe pleinement de la dramaturgie. Le Roi Ours, qui donne son nom à l’oeuvre, détruit ses sujets et se croit à la fois invincible et immortel. Il est confronté, le moment venu, à la puissance ultime du Ver qui s’incarne – pour le spectacle et de façon emblématique – dans une femme issue d’un peuple trop longtemps martyrisé. La légende musicale de Marco Stroppa questionne le pouvoir dans l’esprit de l’opéra bouffe mais aussi du théâtre hugolien et surtout shakespearien, que connaissait bien Boito pour l’avoir traduit ou adapté pour la scène lyrique. Elle analyse les effets du pouvoir sur le rapport à la réalité et à la vérité de ceux qui l’exercent ou l’endurent : le doute qui étreint le tyran, la ronde des compromissions autour de lui, la fascination qu’il exerce sur ses victimes. Porté par les vers de Boito, Marco Stroppa a composé avec Re Orso son premier opéra.
Familier du répertoire lyrique, il a choisi de confronter son univers musical aux paramètres du genre, veillant à la caractérisation des personnages et à la mise en place d’une dramaturgie dynamique. La notion de chant, qui fait la part belle aux
 
voix lyriques, façonne l’écriture instrumentale comme la composition électronique. Le jeu scénique mobilise les musiciens de l’Ensemble Intercontemporain, leur directrice musicale Susanna Mälkki et même un piano robotisé, double mélancolique d’un trouvère qui mourra avec lui sur la scène. L’électronique suit le tempo du chef à l’instar de tous les autres. Le dispositif de spatialisation tire parti du rapport frontal du public au spectacle qu’induit l’architecture de la Salle Favart avant d’investir le plateau pour la scène finale. Le théâtre donne ainsi véritablement corps au discours musical et au parcours sonore de la fable.
Re Orso  est le fruit de la rencontre, par-delà un siècle, d’un artiste d’hier, Arrigo Boito, qui avait profondément souhaité la régénération du genre lyrique, avec un artiste d’aujourd’hui, Marco Stroppa, qui aborde cette problématique avec une vision et des moyens d’expression de notre époque et en partie issus de l’électronique. L’Opéra Comique favorise résolument ce type de confrontation, surtout lorsque la légende musicale qui en découle se présente comme une véritable fable politique. »